Régis Fondateur/Admin.
Nombre de messages : 5359 Age : 67 Localisation : Un petit coin de paradis sur Terre Humeur : Optimiste Date d'inscription : 05/06/2006
| Sujet: LA CONQUETE Mer 3 Aoû - 14:30 | |
| Un film sur Sarkozy Critique de François-Guillaume Lorrain (Le Point.fr)
"Ce qui est chiant avec cette foutue transparence, c'est qu'il faut à un moment affronter la réalité", déclare le candidat Sarkozy pris à son propre piège. On ajoutera : ce qui est chiant aussi pour Sarkozy, avec cette foutue transparence, c'est qu'il lui faut, première pour un président en exercice, affronter le film. Qui le montre à nu, à vif, dans toute son intimité. La construction simpliste du film - il gagne le pouvoir, mais il perd sa femme, Cécilia, d'où la journée du 6 mai 2007 placée sous le double signe d'une victoire politique et d'une défaite intime - a au moins une justification : Sarkozy ne cesse de zapper du privé au public, et inversement, sans transition, tel un comédien très cool - un Belmondo ? - qui passerait en un clin d'oeil de la réalité au jeu.
Les engueulades avec sa femme ont lieu parfois en présence de ses collaborateurs, de ses gardes du corps ou à deux pas d'un public ignorant, dont le sépare seulement une vitre de voiture teintée. On comprend que Sarkozy ait affirmé - faut-il le croire ? - qu'il ne verrait pas le film. Il ne lui serait sans doute pas agréable, par exemple, de revoir la scène où il lutte physiquement avec Cécilia qui a décidé de quitter le foyer conjugal. Jamais le cinéma français ne sera allé aussi loin dans la représentation de la vie privée des politiques.
Un cocu magnifique
Contrairement à son sujet, un Sarkozy qui ne connaît que deux humeurs - l'abattement, la dépression, ou la survolte méprisante, l'insulte colérique -, La conquête appelle un diagnostic nuancé. On sent bien que leurs auteurs - Patrick Rotman, Xavier Durringer - ont cherché à frapper les esprits par quelques répliques destinées à marquer les esprits : "Vous êtes mort", déclare Sarkozy à Villepin lors d'un déjeuner. "C'est moi qui vais le tuer", réplique le Premier ministre, après que Sarkozy a quitté la pièce. Richard Attias, l'amant de Cécilia, est qualifié de "fils de pute", Chirac n'a qu'un mot à la bouche, "chiant", à propos du petit Nicolas et a du mal à s'échapper de la métaphore génitale, Villepin, qui a droit au "grand con", s'exclame : "Je vais le baiser, et avec du gravier (sic !)", sans compter d'autres noms d'oiseaux qui circulent. Nos politiques parleraient donc comme des petits caïds de cour de récré ? Ce choix a son efficacité, mais aussi ses limites.
Comment s'en sort Sarkozy ? Plutôt bien. Son énergie, servie par un comédien au-dessus du lot, Denis Podalydès - à mi-chemin entre l'imitation et l'interprétation -, en fait un véritable protagoniste de cinéma. Il est d'abord l'outsider qui veut déboulonner le vieux Chirac. Il est aussi ce cocu magnifique qui souffre - sa femme, avec Richard Attias, lui fait plus de mal qu'il ne le pensait -, soit deux éléments d'empathie pour le spectateur. En sa défaveur, une vulgarité certaine et l'impression que la politique ("une chose stupide jouée par des gens intelligents", dixit Sarkozy) n'est chez cet animal de pouvoir que simulacre, fabrication, pour arriver à écraser les autres.
Prisonnier du pouvoir
En comparaison, Villepin, Apollon un peu fade, manque de flamboyance, Chirac est à la limite du vieux croulant, qui jette ses dernières cartes, Claude Guéant est une ombre, Henri Guaino a droit, seul, à une véritable affection. Celle qui s'en sort le mieux est évidemment Cécilia, dame de fer aussi effacée qu'à peine tolérée par le premier cercle jaloux ("elle décide, Nicolas s'exécute") qui choisit sa liberté amoureuse plutôt que la comédie du pouvoir.
Dans ce festival, où certains films se répondent, La conquête renvoie à l'évidence à Habemus Papam de Nanni Moretti. Elle se termine sur un plan - Sarkozy montant à la tribune après son élection - qui est exactement l'inverse du balcon pontifical déserté par Michel Piccoli élu nouveau pape. Moretti plaide pour la liberté, le droit au renoncement, Durringer brosse avec justesse le portrait d'un homme seul, prisonnier du pouvoir.
Qu'en ont pensé les festivaliers ? Très attendue, la projection n'a été accueillie que par des applaudissements polis. Les collègues étrangers n'ont sans doute pas compris toutes les allusions. Et puis il y a ce terrible effet de réalité nommé DSK, cette "chute en direct" qui coupe l'herbe sous le pied de La conquête. Il y a tellement plus fort dehors. Du reste, la réplique qui a fait vraiment mouche est cette phrase de Sarkozy draguant à mort une journaliste blonde : "Vous savez, les hommes politiques, c'est des bêtes sexuelles." Tout un symbole..."Source : http://www.lepoint.fr/cinema/festival-de-cannes-2011/la-conquete-il-cause-il-flingue-et-pleure-sa-femme-18-05-2011-1332140_360.php | |
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