Frère Djwal Khool
(Alors que tout le monde se réjouit des révélations actuelles sur l'ascension, sur la technologie extraterrestre que certains promettent à l'humanité pour bientôt, etc, etc... il me semble important que chacun et chacune lise (ou relise) ces paroles sages et essentielles d'un des grand Frères de Shambhalla, connu sous le nom de Djwal Khool)Quelques marches se profilent derrière un taillis couvert de fleurs rouges, nous les gravissons d’un bon pas, découvrant ainsi du regard un minuscule vallon protégé par de hauts conifères. C’est un vallon tout de quiétude et baigné d’une lumière aux accents bleutés. La terre fraîchement remuée y prend une teinte mordorée et fait songer à un champ, à quelque espace béni par la Nature elle-même et prêt à être cultivé.
Un peu plus bas que nous, dans un de ses angles, un être recourbé paraît caresser amoureusement le sol. Alors, une force en nous se met immédiatement à battre, un flot d’émotion incontrôlable nous propulse jusqu’à lui. Il n’y a plus de sentier, plus de nature, plus rien que deux créatures comme une seule âme se projettant face à cet homme... en un tourbillon, en un éclair. Rien d’autre ne se meut que son échine et son visage qui se redressent lentement dans un geste souple. Nous plongeons dans quelque chose d’insondable...
Ce sont deux yeux pâles, presque gris qui nous dévisagent maintenant et qui se plissent comme pour sourire. L’homme paraît avoir la soixantaine, ses cheveux sont rares et son visage tout entier, de type asiatique, révèle de profonds sillons. Une longue et fine moustache selon la mode chinoise encadre régulièrement sa bouche.
« Vous voilà... » fait-il simplement en accentuant son sourire... Ces deux mots nous ont caressé le cœur et quelque chose en nous dit que nous les attendions. Quelque chose nous trouble en eux au-delà du poids de leur signification. L’échange des regards est intense, indicible et, pendant un instant, c’est comme si le sol de Shambhalla avait perdu toute consistance sous nos pieds.
Le vieil homme réitère son sourire sans en dire plus et peu à peu nos corps retrouvent leurs perceptions. L’émotion demeure mais son anesthésie est supplantée par un étonnement plus puissant encore. Ces yeux, ce visage, toute cette bonté ne sont autres que ceux du lama qui, quelques instants auparavant, a fait irruption dans notre cellule du Gompa d’Hémis... C’est lui, notre guide de lumière jusqu’en cette terre de Shambhalla, lui dont la présence s’est mystérieusement évaporée au bout du grand tunnel de clarté... Mais qui est-il ?
Immobile, avec un port de prince oriental, le vieux lama se tait, il nous drape de son aura et nous pourrions demeurer ainsi des heures, des jours... Cette seconde, cette éternité sont privilégiées, nous en sommes certains car en elles nous entrevoyons le But, dans un éclair de lucidité.
Instantanément une force incontrôlable remue en nous, pêle-mêle, de vieux souvenirs, des phrases fugitives, des livres d’autrefois et des visages et des portraits... Un ancien portrait, un croquis au crayon reproduit sur un papier cartonné légèrement jauni et corné à ses angles. Nous cherchons un nom et il ne vient pas... L’image s’enfuit, réapparaît, persiste. Les yeux de notre âme cherchent, quelque part, en bas de la feuille jaunie de petits signes à l’encre noire, quelques lettres, des mots : « Maître D.K. Djwal Khool, membre de la Fraternité des Himalayas ».
L’image se brouille et nous plongeons à nouveau dans le regard du lama dont l’insistance ne nous a pas quittés. Stupidement, nous ne comprenons pas tout de suite ce que cela signifie, ni ce que peut représenter la présence de cet Être dont le nom évoque tant à travers la Tradition.
Toute réflexion se suspend instantanément, notre esprit est vide de pensée et notre seule perception est celle d’être placés « en charge » sur la fantastique force d’Amour de ce regard. Terrible leçon d’humilité où l’on se sent petit et amputé du véritable cœur ! Le vieux visage parcheminé rayonne... et dans une lueur crépitante la marque du temps s’estompe. Les rides et tous les plis de sa peau burinée n’existent plus... Ils n’ont jamais existé. La Paix et la Lumière n’ont pas d’âge. La Paix est un silence...
La métamorphose s’est accomplie en une fraction de seconde. L’Être qui se tient face à nous est un homme encore jeune aux longs cheveux ébène. Il a le visage long, d’une grande beauté, rehaussé d’une petite barbe brune. Contrairement à tous ceux rencontrés précédemment, il porte une longue robe blanche à l’aspect soyeux, la taille légèrement soulignée par une cordelette. Sa stature, supérieure à celle d’un homme moyen, concourt à créer une impression de puissance sereine. Il ne dit toujours rien ; peut-être attend-t-il une simple réaction de notre part. Son regard nous capte toujours, comme un cristal, comme un rayon de sagesse, il paraît envelopper de sa pureté ce qu’il approche.
Que dire ? Que nous sommes heureux de sa présence ? Quelle sottise ! Quel gouffre de banalité ? Comment l’appeler ? Maître ?
« Frère... » dit-il simplement, rompant ainsi l’or du silence. Et sur ce petit mot qu’il a su charger de tendresse, le « Frère » s’asseoit à même le sol de Shambhalla en un parfait lotus. Deux fois de suite, il hoche légèrement la tête de haut en bas et nous comprenons qu’il désire que nous l’imitions. La terre est souple et vivante, elle s’offre à nous comme un coussin. Sa douce chaleur monte le long de notre colonne vertébrale et paisiblement s’infiltre dans nos membres. Il n’y a pas la plus petite brise dans les hauts conifères, pas le moindre signe de respiration dans nos poitrines... et pourtant, quelle force de vie !
« Ma Sœur, mon Frère, un nom compte peu ici. Peu importe qui je suis et quel est mon visage. L’Amour que l’on veut être porte mille noms et sculpte mille visages selon les nécessités des Temps. Mais de grâce, ne me gratifiez pas du nom de Maître. Ici, et dans le cœur de chacun, il n’en existe qu’un qui soit digne de le porter et Celui-là, il n’est pas nécessaire de Le nommer.
Qu’est-ce que la maîtrise, Frères ? C’est tout ce qui Est, c’est-à-dire, ce qui ne fait pas semblant d’Être, c’est-à-dire aussi ce qui ne se pare pas des attributs du transitoire... et jusqu’à un certain point, nous sommes tous transitoires. »
Disant cela, l’Être écarte les deux bras de chaque côté de son corps ; la pointe de ses doigts demeure en contact avec le sol et dès lors c’est réellement un ami qui nous parle, un ami de toujours qui a su comment grandir. Sa voix est chaude ; sa présence s’installe en nous et entreprend son œuvre...
« Voyez-vous, les humains qui connaissent notre existence se plaisent à développer une quantité d’idées fausses quant à notre nature, notre place et notre rôle. Tout d’abord, Frères, vous pouvez constater que le monde de Shambhalla est par essence différent de celui que vous qualifiez d’astral, ou d’autres noms encore. Disons simplement que sa matière offre plus de subtilité que celle de votre monde. Rien ne servirait d’établir de nouvelles classifications. La force mentale a eu son règne, nécessaire, mais qu’il faut maintenant dompter et dépasser. Tous ici nous avons concouru, il est vrai, à entretenir et développer cette force. C’était indispensable afin de semer dans l’humanité les germes de concepts qui n’auraient pu éclore autrement Ceux-ci, je vous l’affirme, seront assimilés bien différemment au cours de l’ère à venir.
Donc, commencez par comprendre que ce lieu n’est pas un lieu de l’âme nourri par les rêves ; ni les vôtres, ni les nôtres. Il n’est en aucun cas non plus la villégiature de quelques sages privilégiés qui contemplent l’humanité et jouent avec son destin.
Shambhalla doit prendre place dans le conscient des hommes, comme terre de Beauté, d’Amour et de Connaissance, mais aussi de Travail. Aucune force contestable n’a élaboré ce lieu. Aucune volonté arbitraire ne nous a créés tels que nous sommes. Nous n’avons que la prétention d’être des humains, ni plus ni moins comme tous ceux de la Terre.
Je souligne ce fait : comme tous ceux de la Terre ; même si certains d’entre nous sont reliés par leurs lointaines origines à la planète Vénus, cela ne change rien. Peu d’hommes savent d’ailleurs qu’ils proviennent de multiples mondes, de multiples systèmes solaires et que la Terre n’est qu’une halte, une nourrice.
Ainsi, nous n’avons pas plus de capacités que le plus humble des hommes. Jamais nous n’avons été désignés par ce que vous appelez « Dieu » pour développer de prétendus pouvoirs. Nous ne sommes que nous-mêmes alors que les terriens ne sont pas encore eux-mêmes. Je ne saurais m’exprimer plus clairement. Notre force réside dans le fait d’avoir compris que nous n’avons pas à attendre notre développement d’une énergie extérieure à nous, sous quelque nom, sous quelque forme qu’elle se présente. La Vérité ultime, le moteur de toute avance est de comprendre que rien ne peut être extérieur à nous puisque tout est en nous, jusqu’à la voûte étoilée que l’on contemple chaque soir. Cela, me direz-vous, devient un lieu commun, un concept que nombre de philosophes, de métaphysiciens ou de spiritualistes ont admis... Mais comment, Frères, l’ont-ils admis ? Ils l’ont admis en perpétuant dans leur cœur, le «je » et le « tu », le « moi », le « toi » le « mien » et le « tien ».
Shambhalla vous parle d’Amour, de rien d’autre et non pas de ses simulacres.
Nous ne jugeons pas, amis... Un seul jugement éparpillerait les trésors de lumière de ce royaume. C’est une évidence que vous pourriez qualifier de mathématique. Nous constatons et nous vous tendons nos bras. L’Amour, savez-vous, n’est pas un vague sentiment qui se partage. On ne partage pas ce qui depuis le commencement des Temps emplit tout de sa présence équitablement Toute créature, la moindre poussière même, l’a reçu en abondance. Tout est simplement une question de conscience, c’est-à-dire de voiles à lever.
Le caillou, l’herbe du chemin, l’amibe, le chien qui traîne au coin d’une rue sont tous des Christ en puissance. Si cela choque une âme, une conscience, c’est que celle-ci doit se défaire d’un carcan de plus. L’unique chose qui soit choquante pour autant que l’on veuille admettre ce terme, c’est de refuser la lumière à une forme d’existence.
Frères, Soeurs, si le Grand Amour ne nous illuminait pas c’est de cette méconnaissance et de ce mépris de la Vie que nous pourrions pleurer en ces lieux. »
L’Être se tait et sourit, et c’est comme s’il compensait ainsi la gravité de ses dernières paroles. Autour de nous la Nature s’est estompée ; tout au plus le chaud contact de la Terre se fait-il encore sentir. Nous pensons comprendre que le Frère D.K. a développé autour de nos deux âmes la sphère dorée de son aura car une sorte de brume ou de vapeur électrique circule lentement. Nos yeux s’y baignent et y devinent de minuscules gouttelettes en suspension ; elles dansent en rythme semble-t-il et nous font penser à des notes de musique sur une invisible partition.
Nous nous y perdrions, sans rien vouloir de plus... mais le flot lent des paroles reprend.
« Bien souvent j’entends l’écho des questions des hommes de la Terre : « oui, oui, dit-il, mais quelle est La Voie ? » Il est d’usage de dire que les voies sont multiples et mènent toutes au même but, qu’elles s’adaptent aux tempéraments, aux climats. S’il me faut m’exprimer de façon abrupte, Frères, afin d’aller au cœur ultime des choses, je vous dirai qu’il n’y a pas de Voie... Reconnaître qu’il existe une Voie serait affirmer que la lumière est éloignée des hommes, qu’elle est comme un point, une lueur à l’horizon. Or, sachez-le bien, jamais ne croyez cela. Il n’y a pas à marcher réellement, il n’y a pas à se projeter vers le futur. Le Grand Soleil est déjà là, en chacun, autour de chacun. Parler de chemin, c’est une façon de parler d’avenir. Cette notion n’est rien d’autre qu’une illusion de plus. Le Présent Étemel détient la clé. Immobilisez ou plutôt cristallisez l’Amour en vous et le Temps s’effritera avec son cortège de projets.
Votre corps de gloire attend simplement que vous le regardiez en face, c’est-à-dire que vous n’en fassiez plus quelque chose de flou et d’hypothétique, un autre vous-même à fabriquer.
L’Homme sommeille en l’homme.
Ici, nous vivons l’Éveil. Nous n’avons fait que nous retrouver et ce que vous appelez « merveilles » n’est que la conséquence logique de l’Être, non plus de l’existence. L’Être, qualifié de maître parmi les hommes, est simplement celui qui peut proclamer le « Je suis » dans toute sa splendeur, c’est-à-dire dans toute son impersonnalité, ou plutôt sa capacité d’englober le Tout, de se fondre en toute forme de vie.
La totalité de ce que je viens de vous dire n’a rien d’une leçon à apprendre, ce n’est pas un mode d’emploi de soi-même pour une ère de félicité. Il ne peut y avoir de technique ni de réponse rationnelle pour résoudre la question du « Comment Être ».
L’ensemble de la race humaine croit se trouver devant un labyrinte, ne sachant pas que celui-ci est l’image illusoire de la projection des pensées.Il faut maintenant cesser de s’excentrer car il n’y a qu’un pas de soi au Soi, un pas que nous empêche de franchir notre seul ego. L’âme a le visage de cet ego. L’âme a vécu ce qu’elle devait vivre, il vous faut enfin la laver et la dissoudre dans l'Esprit dont elle procède.
Dites « je le veux » Frères, mais que votre «je » soit un « Je » divin, que votre vouloir soit une note dans l’harmonie des sphères... et cela sera... puisque cela est déjà !
Vos connaissances ne vous serviront à rien, ou à si peu... Qui a jamais vu une encyclopédie se feuilleter elle-même ? La science en conserve est indigeste. Votre amour, s’il est l’Amour, ne se portera jamais en équation pas plus qu’en définitions métaphysiques. Prendre un stylo, enfoncer un clou, préparer un repas sont les gestes quotidiens des hommes. Si pour vous ils sont insignifiants, ils sont aussi l’aveu de votre égarement. Qu’ils deviennent vos prières de vie et vous demeurerez au centre de vous-même.
Non, Frères, il ne s’agit pas de croire ; ce n’est pas un problème de foi comme on vous le dit souvent. C’est un problème de lâcher prise, de libération par rapport à ce que l’on croit avoir acquis. Il ne faut pas croire mais agir ou plutôt laisser agir la force divine en soi. Ainsi, comprenez-le, ce n’est pas une tension qui est demandée à l’homme mais au contraire une décrispation de ses masques.
Regardez maintenant nos corps et celui de cette contrée. Ce ne sont pas des habits astraux comme vous le pensez peut-être. Nous n’avons pas laissé nos vêtements de chair quelque part sur terre derrière nous. Nous avons hissé notre matière dense jusqu’à ce plan. Rien n’est superflu en l’homme, pas même ce qu’il considère comme vil et mortel.
Persiste dans l’avilissement et le cycle des morts ce que l’on veut bien faire persister ainsi. Le plomb et l’or cachent le même être. Le grand secret consiste à faire admettre au plomb qu’il se doit de faire vibrer différemment son lourd manteau. Tout enfant représente déjà en potentiel un adulte accompli. Ce n’est pas une énergie fondamentalement neuve mais une force sans âge qui vient du Soleil, se couvre de scories et cherche à nouveau le Soleil.
Ainsi, que les humains sachent que l’on ne peut dédaigner le corps et la matière dans leur totalité sans soi-même s’apesantir. La matière est votre tremplin, je veux dire un des aspects de la vie auquel vous devez faire retrouver sa divinité ou sa lumière première. Amis, je vous le dis, l’être qui fuit cette vérité ferme les portes de son essence primordiale. Aimez sans commune mesure, aimez comme l’Amour lui-même et vous insufflerez à vos atomes de chair un élan vibratoire tel que les rêves les plus fous ne le permettent pas.
Comprenez-vous ainsi le véritable sens de la « résurrection de la chair » ? Il n’y a que la différence d’une prise de conscience entre l’état de poussière, celui de soleil et celui encore de galaxie. Voulez-vous que je change de langage ?... Je vous dirai : modifiez votre longueur d’onde, ne vous déplacez plus sur la même portée musicale. Votre espoir le plus inouï est toujours au-dessous de la réalité ! Vous êtes vibration parce que tout est vibration, que vous le vouliez ou non. Ainsi sommes-nous tous, modulables, perfectibles à l’infini.
Il n’y a pas de prouesse à avoir accompli et à continuer d’accomplir cet état de vie dont vous êtes présentement témoins. Nous avons simplement commencé à vivre, le jour où nous nous sommes enfin regardés en face, tels qu’en nous-mêmes. Cette tâche est celle qui attend toute créature.
Lorsque les religions affirment « cherchez la divinité ou cherchez Christ au fond de vous-mêmes » cela ne signifie pas autre chose. L’Homme est Dieu à la fois dans les aspects qu’il ignore encore de Lui et dans Sa globalité.
Que ces affirmations, pour brutales qu’elles puissent paraître, ne vous heurtent pas. Retenez-les et méditez-les. L’humain a pour tâche de mettre fin à l’énergie centrifuge qui l’éloigne de lui-même. Je ne peux être plus précis, Frères. Tout semblable discours devient verbiage si l’on veut le pousser plus avant »
Extrait de "Le Voyage à Shambhalla", de D. Meurois et A. Givaudan)