Présidentielle : il faudra payer pour voter
Une urne payanteLe ministre de l’Intérieur Claude Guéant a annoncé aujourd’hui que le vote aux élections et référendums serait désormais assorti d’une « contribution citoyenne » d’un euro. Cette participation obligatoire est destinée à financer l’organisation et la logistique des différentes consultations populaires. Selon le ministre, sa création répond à une double logique de développement de la démocratie directe et de maîtrise des dépenses publiques : « Dans le prolongement de la révision constitutionnelle de 2008, qui a élargi le recours au référendum, le chef de l’État a fait part de son intention, si les Français lui renouvellent leur confiance, de trancher les blocages institutionnels éventuels en les consultant directement. Dans un souci de responsabilité budgétaire, les citoyens sont appelés à participer au coût d’organisation de ces consultations et des autres opérations électorales. Il ne s’agit de rien d’autre que du financement de la démocratie. »
Claude Guéant a vanté les mérites de la réforme, notamment son équilibre : « Le montant de la contribution a été fixé à un niveau très bas afin que personne ne soit exclu du suffrage pour des raisons pécuniaires. Toutefois, le dispositif prévoit aussi la possibilité du vote multiple pour certaines consultations, notamment d’intérêt local, de façon à accorder plus de poids au suffrage des citoyens les plus investis dans le processus démocratique. »
Les modalités d’organisation pratique des opérations électorales relevant du pouvoir réglementaire du gouvernement, leur modification ne nécessite pas un vote du Parlement. La nouvelle contribution pourra donc être perçue dès les prochaines élections. Elle sera valable pour les deux tours, son versement au premier tour étant attesté par le tampon apposé sur la carte d’électeur. Dans les bureaux de vote déjà équipés de « machines à voter » électroniques, celles-ci seront pourvues d’un monnayeur analogue à ceux des distributeurs automatiques. Dans les autres bureaux, les contributions seront collectées dans une caisse associée à l’urne et placée sous la responsabilité de deux assesseurs. D’autres moyens de paiement sont prévus à terme, notamment l’envoi de SMS surtaxés, à la condition expresse que les électeurs concernés se soient préalablement inscrits sur le site service-public.fr pour y vérifier leur identité. La contribution sera d’un montant égal dans tous les cas de figure, les SMS envoyés n’étant pas soumis à un prélèvement des opérateurs téléphoniques.
« Une insulte au peuple »
À gauche, les réactions ne se sont pas fait attendre. François Hollande a exprimé sa perplexité devant une réforme « aussi injuste qu’inopportune ». « Les Français, déjà durement éprouvés par la crise économique, se voient imposer une nouvelle charge, un nouvel impôt, une taxe sur le droit de vote. Comment l’accepter ? » Le candidat socialiste voit dans cette contribution « une manœuvre désespérée du candidat sortant pour échapper à la sanction des urnes, en écartant du suffrage ceux qui ont le plus souffert de son mandat ». Pour Jean-Luc Mélenchon, il s’agit d’une « véritable insulte au peuple ». Le leader du Front de gauche avertit même le gouvernement : « Prenez garde, petits messieurs qui vous croyez tout permis, que la vache à lait que vous voulez traire une fois de trop ne vous décoche bientôt une ruade libératrice. »
À droite, l’UMP affiche pour le moment un front uni. Son secrétaire général, Jean-François Copé, est monté le premier au créneau pour défendre une mesure « innovante et pleine de bon sens » et dénoncer « l’inconséquence et l’incohérence du candidat socialiste ». « Il y a à peine quelques mois, Monsieur Hollande se réjouissait du succès des primaires du PS, financées par ses militants et ses sympathisants, et déclarait – je le cite – qu’"un euro, ça n’était pas cher pour se débarrasser de Nicolas Sarkozy". Aujourd’hui, il fait mine de s’offusquer d’une contribution du même montant qui permettra de financer les élections et les référendums à venir. C’est à n’y plus rien comprendre ! » D’autres membres éminents de l’UMP sont moins enthousiastes et confient en privé leurs craintes que la réforme ne soit mal comprise et n’alimente le rejet du parti majoritaire à la veille d’élections difficiles.
http://fr.news.yahoo.com/presidentielle-il-faudra-payer-pour-voter.html