Février 2012
Les débordements du Réveil
Il y a une bonne trentaine d'années, lorsque je suis entré de plain-pied dans le monde dit de la spiritualité, je me suis imaginé tout un tas de choses…
J'allais forcément y rencontrer des ¨initiés¨- c'était alors le terme à la mode - ainsi qu'une foule personnes qui volaient en haute altitude. En quelques mots, j'étais convaincu de pénétrer dans un milieu d'exception où l'éthique régnait, où se cultivaient les plus belles valeurs humaines et où le niveau de conscience était nécessairement supérieur à la moyenne et, d'évidence, tourné vers le service à autrui.
Et lorsqu'aujourd'hui je contemple dans ma mémoire toutes ces années passées, je me dis qu'effectivement mon engagement et les distances parcourues ont fait que j'ai été amené à rencontrer des personnes d'exception… de belles âmes, éprises de bonté, de pureté aussi. Des âmes qui m'ont fait croire en l'humanité et encouragé - souvent à leur insu - à poursuivre mon chemin.
Mais lorsque je pénètre un peu plus avant dans cette même mémoire, je m'aperçois également que de telles âmes ne fréquentaient pas nécessairement les sphères dites spirituelles. C'étaient juste de belles âmes aux regards généreux et aux sourires vrais. Des âmes sans ¨tiroirs à double fond¨, ainsi que j'aime à le dire.
À franchement parler, c'est surtout d'elles dont je me souviens parce que ce sont elles qui, aujourd'hui encore, bien des années plus tard, continuent à occuper mon esprit et mon cœur. Je vois à quel point elles n'ont pour cela jamais eu besoin d'avoir recours à des théories ou à des discours. Elles ignoraient une quantité de choses réputées lumineuses et c'était sans doute mieux comme cela car elles étaient tout naturellement elles-mêmes.
L'absence de prétention, c'est rare et respectable chez un être humain.
Je vais maintenant vous confier le fond de ma pensée… même si je sais d'avance que celui-ci ne plaira pas à tout le monde : Il y a longtemps que je suis un peu las du monde qui se dit de la spiritualité.
Pourquoi ? Parce que, toutes tendances confondues, il n'est décidément pas plus spirituel qu'un autre. Parce que, comme les autres - ceux que l'on qualifie de profanes - il a ses dictateurs, ses endormis, ses escrocs et ses comédiens. Parce que, comme partout ailleurs, j'y rencontre trop souvent l'inconscience et la prétention… et même régulièrement la méchanceté.
Mais ne vous inquiétez pas… Mon intention n'est pas de piquer une crise d'amertume !
Je demeure un amoureux de la vie et je reste très confiant dans le potentiel de lumière que nous portons tous en nous.
Je cherche seulement à dire ici que lorsque l'on prétend s'occuper de la floraison de la conscience, on se doit d'être plus vigilent et plus exigent envers soi-même que nulle part ailleurs.
…Parce que nos préoccupations ne suffisent pas à faire de nous de meilleurs êtres humains, qu'elles ne font pas non plus de nous les membres d'une sorte d'élite et encore moins les candidats systématique à l'¨ascension¨.
L'orgueil, la prétention et l'arrogance sont très insidieux dans le ¨milieu de l'esprit¨, voyez-vous. Je dirais même redoutables parce que soi-disant ¨éclairés¨. L'esprit qui découvre son existence n'est bien souvent qu'un égo qui explose…
Dans ce type de contexte, la denrée la plus rare, c'est donc l'humilité. Ce que j'observe constamment m'en fait le témoin : les maîtres improvisés et les donneurs de leçons dépourvus de vécu pullulent.
Quelle est la raison de tout cela ?
Elle tient, me semble-t-il, dans ce que j'appelle ¨les débordements du Réveil¨. Ce sont des sortes de bouffées de chaleur qu'expérimente l'âme humaine lorsqu'elle commence à entrer en fermentation, c'est-à-dire lorsqu'elle aspire soudainement à grandir et à deviner Ce qui l'habite.
Il s'agit d'une crise apparemment difficile à contourner et par laquelle nous passons certainement tous à un moment ou un autre de notre évolution. Une crise pathétique puisque ceux qui la traversent se centrent sur leur ¨moi-je¨ pour dénoncer avec suffisance la dualité et le côté illusoire de notre monde… dont ils ont bien sûr décodé la vanité. Une crise enfin qui prend l'ampleur d'une épidémie en ces années de chamboulement général qui sont les nôtres.
Si je me laisse aller à évoquer de telles observations aujourd'hui, ce n'est pas pour déplorer ni jeter la pierre à quiconque en particulier puisque, tout comme le corps, la conscience doit passer par des crises d'adolescence.
Si j'aborde le sujet, c'est pour la responsabilisation de tous, c'est pour la simplicité; c'est pour que nous soyons de moins en moins nombreux à vouloir jouer des rôles que nous ne sommes pas capables de tenir. C'est pour qu'il y ait moins de ballons qui se gonflent à tous les vents. C'est pour que, finalement, on en revienne juste au bon sens.
Je parlais plus haut de simplicité… Ne voyons-nous pas qu'il y a en elle tout ce dont notre cœur a besoin ?
La simplicité sous-entend la spontanéité, la générosité, la bonté, le pardon, l'amour… La liste pourrait s'allonger encore mais elle deviendrait… compliquée !
La simplicité de l'âme, je la vois comme le reflet de cette vérité ultime qui nous habite mais que nous cherchons partout ailleurs.
Personnellement, je ne suis pas intéressé à savoir ce que les Maîtres mangent en hiver à Shambhalla, à quel niveau vibratoire j'en suis, ni à partir de quels points de notre Terre, une flotte galactique emmènera les ¨meilleurs d'entre nous¨ vers une planète d'accueil.
Tout cela pour vous dire - ou plutôt vous redire - tandis que notre monde se fissure, qu'il est urgent de se rendre compte que l'heure est venue d'être vrais et humbles.
C'est définitivement au pied du mur que nous exprimerons ce que nous aurons compris et intégré, avec courage, lucidité, confiance… et joie bien entendu.
Daniel Meurois